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Sous perfusion humanitaire, Gaza s’alarme d’une flambée de Covid-19

Par Clothilde Mraffko (Jérusalem, correspondance)

samedi 16 janvier 2021

Photo - À Gaza, le 18 décembre. Début décembre, un confinement partiel a été mis en place : couvre-feu à partir de 18h30 et fermeture totale les week-ends (vendredi et samedi) MAHMUD HAMS / AFP

Longtemps, la bande de Gaza a été épargnée. Le blocus israélien, qui l’isole du monde depuis 2006, avait retardé l’arrivée de l’épidémie de Covid-19, et les autorités avaient mis en place un système de quarantaine draconien pour tout voyageur de retour dans l’enclave palestinienne. Mais rien n’est parfaitement étanche. En août, les premiers cas ont été détectés parmi ses 2 millions d’habitants et si, pendant quelques mois, les autorités ont réussi à circonscrire l’épidémie, les compteurs s’affolent ces dernières semaines. Un tiers des tests de dépistage réalisés sont désormais positifs, et le nombre de décès liés au coronavirus a doublé en trois semaines, pour atteindre plus de 300 morts, dimanche 27 décembre.

Après des années de blocus, « le système de santé à Gaza est sous pression, les ressources sont très limitées », s’inquiète Bassem Naïm, ancien ministre de la santé, à la tête du comité des relations internationales du Hamas, le mouvement islamiste qui dirige l’enclave. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les unités consacrées au Covid-19 sont occupées à 80 %. « Nous ne pouvons pas ouvrir d’autres lits, car les hôpitaux doivent continuer à soigner les patients hors Covid-19 », poursuit M. Naïm.
L’enclave navigue à vue, tentant de pourvoir aux besoins les plus pressants avec une aide internationale délivrée au compte-gouttes. « Nous manquons de tout : des tests, des équipements de protection (PPE)… Ce que nous avons reçu, via des donations, bien sûr, ne suffit que pour quelques jours. La plupart de notre personnel médical ne dispose pas de PPE qui les protège efficacement pour travailler », explique l’ex-ministre du Hamas.

Confinement partiel

Début décembre, un confinement partiel a été mis en place : couvre-feu à partir de 18h30 et fermeture totale les week-ends (vendredi et samedi). Mais rien n’y fait, l’épidémie s’infiltre partout dans les camps surpeuplés et les appartements minuscules. « C’est compliqué de faire respecter toutes les mesures. Même quand les gens sont confinés, les familles sont nombreuses : en général, quarante à cinquante personnes qui s’entassent dans une même maison », décrit Ziad Medoukh, responsable du département de français à l’université Al-Aqsa.
L’option d’un reconfinement « est toujours sur la table », assure Bassem Naïm. Mais Gaza n’est pas certaine de pouvoir se permettre une mise à l’arrêt totale. Des milliers de travailleurs journaliers ont déjà perdu leur gagne-pain à cause des diverses fermetures. Avant la crise sanitaire, quelque 80 % des habitants survivaient grâce à l’aide humanitaire ; certains pourraient désormais se retrouver le vendre vide.
Sans espoir d’acquérir un vaccin rapidement, Gaza comme la Cisjordanie jonglent entre les restrictions tout en tentant de préserver leur très fragile économie. L’OMS espère pouvoir acheminer les premières injections dans les territoires palestiniens « début ou milieu 2021 » – dans les faits, probablement pas avant le mois de mars. « Nous ne savons pas exactement quand les vaccins seront disponibles pour être distribués, car de nombreux vaccins potentiels sont à l’étude et plusieurs essais cliniques sont en cours », a précisé Gerald Rockenschaub, directeur de l’OMS dans les territoires palestiniens occupés.

Problème des stocks

En parallèle, les autorités palestiniennes étudient la possibilité de se procurer des vaccins par le biais d’autres canaux, dont la Russie notamment. Une source a laissé entendre au Monde qu’en l’état, Israël, qui contrôle les frontières, ne s’opposerait pas à l’importation de vaccins. L’Etat hébreu a, de son côté, lancé en grande pompe sa campagne de vaccination, le 20 décembre, juste avant de déclarer un troisième confinement, en vigueur depuis dimanche.
Israël et l’Autorité palestinienne discutent des vaccins, assure l’OMS. Mais les Gazaouis, eux, ne font « pas officiellement partie des négociations, rappelle Bassem Naïm, à cause des divisions entre l’Autorité palestinienne de Ramallah et le Hamas. Nous ne savons donc pas exactement quand et si nous aurons accès au vaccin ». Reste aussi le problème des stocks : la plupart des injections doivent être conservées dans des conditions de réfrigération très strictes, pour l’instant impossibles à garantir dans l’enclave. En Cisjordanie, par exemple, le vaccin Pfizer-BioNtech ne pourrait être stocké que dans une seule installation, à Jéricho.
Certains se tournent donc vers Israël, qui assure avoir déjà sécurisé de quoi vacciner plus de la moitié de ses 9 millions d’habitants. « Si nous devions constater que les besoins en Israël ont été satisfaits et que nous avons des surplus, nous allons certainement envisager d’aider l’Autorité palestinienne », a déclaré le vice-ministre israélien de la santé, Yoav Kisch, à la radio publique, le 17 décembre. Insuffisant, rétorque Ran Goldstein, directeur exécutif de l’ONG Physicians for Human Rights-Israel. En tant que puissance occupante, « selon le droit international, Israël a l’obligation » de fournir des vaccins aux Palestiniens, martèle-t-il. « C’est dans l’intérêt d’Israël aussi, car Israéliens et Palestiniens vivent ensemble, malheureusement il y a des colonies israéliennes dans les territoires occupés, donc vous ne pouvez pas faire de différences. »

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