Nos Six Heures se sont ouvertes en présence de Hervé Leblanc de la
CGT, d'Alain Goiny de la FSU et de François Vaillé de la Maison du
Monde et ont permis aux associations partenaires de solidarité avec
le peuple palestinien d'exprimer fortement leur implication
aujourd'hui: Artisans du Monde pour sa campagne de promotion des
dattes de Palestine en cette période de fêtes, les Amis du Théâtre
de la Liberté de Jénine pour l'organisation d'une tournée théâtrale
de jeunes de Jénine en Juillet 2011, la CCIPPP pour son implication
forte au sein du Collectif pour une paix juste dans le montage de
l'initiative "un bateau français pour Gaza" qui doit se concrétiser
en avril 2011, l'UJFP à travers un témoignage au retour de Palestine
d'une mission civile composées "de juifs et d'arabes de France" qui
appelle à participer activement à la campagne BDS.
Evry Palestine rappelle que cette campagne s'inscrit comme acte
citoyen de dénonciation de la colonisation ; c'est un appel à la
solidarité et à l'exigence du respect du droit par Israël ; Evry
Palestine exprime sa solidarité avec tous les militants poursuivis
dans le cadre de la campagne BDS.
Retours de Gaza et témoignages de nos amis de Gaza
Puis la séquence sur
Gaza.dans laquelle s'implique Evry
Palestine, qui a été à l'initiative du jumelage-coopération d'Evry
avec le camp de réfugiés de Khan Younis, avec lequel Evry Palestine
continue à mener des projets en coopération avec des ONG
palestiniennes. Toute la population de Gaza est assiégée, enfermée
et pourtant elle résiste et vit:
Roland Lombard, président du CICUP, qui s'est rendu Gaza dans un
congrès scientifique, a témoigné de la résistance des étudiants et
professeurs palestiniens, qui ont réussi dans ces conditions un
congrès de bonne tenue scientifique.
Christophe Denantes, médecin, a témoigné sur les missions qu'il mène
avec le professeur Oberlin, l'importance de cette chirurgie
réparatrice, la compétence des médecins et chirurgiens palestiniens
qui se forment à travers ces missions pour suppléer aux carences et
soigner les blessures.
Ceux de nos amis de Gaza : Selma, Fuad, Najma, Ziad, sur le blocus
qui se prolonge, le travail que parvient à faire l'UNRWA, les
conséquences du blocus dans tous les domaines de la vie,
l'enfermement, mais aussi la volonté de vivre, de résister, de
continuer à étudier.
Le lancement de l'opération "Un bateau français pour Gaza" à Evry et en Essonne
Face à ce constat, nous avons lancé à Evry, l'initiative "
Un
Bateau français pour Gaza", comme partout en France à l'appel
de 60 organisations du Collectif National et de la Plateforme des
ONG pour la Palestine. Nous l'avons fait devant la maquette
symbolique de bateau que nous avions préparée, en présence et avec
la participation de Jamal Zahalka et de plusieurs organisations de
notre collectif Palestine Evry Essonne. Nous l'avons fait en
rappelant les mots d'ordre de la campagne nationale, pour dénoncer
et briser le siège israélien de Gaza, pour promouvoir et faire
respecter le droit international :
Parce que nous refusons de voir 1 million et demi de personnes sous
blocus ;
Parce que la communauté internationale doit imposer la levée totale
du blocus de Gaza ;
Parce que nous n’acceptons pas que nos États se contentent de
paroles jamais suivies d’actes ;
Parce que la première Flottille de la liberté a montré qu’une action
citoyenne peut rompre le mur de l’indifférence.
Notre thème central : les Palestiniens d'Israël
Nous avions centré les Six Heures cette année sur le thème
"Les
Palestiniens d'Israël".
Jamal ZAHALKA, dirigeant du
parti Balad (gauche laïque) et député à la Knesset, était notre
invité sur ce thème, ainsi que
Yaël LERER, militante du même
parti.
Israël compte 15% de palestiniens, soit 1,3 millions de personnes,
qui sont citoyens de ce pays. Déjà spoliés d'une grande partie de
leurs terres depuis 1948, déjà discriminés dans leur accès à
l'emploi, ils vivent en ce moment une période particulièrement
tendue. Il ne se passe
pas une semaine sans qu'une nouvelle loi
raciste soit présentée ou votée à la Knesset. Ainsi, la loi
sur les communautés, véritable loi d'Apartheid, qui permettra aux
petites villes de choisir leurs nouveaux habitants sur leurs propres
critères... Sans compter la situation surréaliste de couples mariés
entre Palestiniens d'Israël et de Cisjordanie, qui n'ont plus le
droit de vivre ensemble !
Le parti Balad a été créé il y a 20 ans sur le principe
"un Etat
pour tous ses citoyens". Il compte trois députés à la Knesset,
dont Jamal ZAHALKA et Haneen ZOABI, qui participait à la flottille
pour Gaza sur le bateau Avi Marmara. Il agit dans des conditions
difficiles, sa participation aux élections est à chaque fois
contestée par le pouvoir, son ancien dirigeant Azmi Bishara a été
contraint à l'exil, Haneen Zoabi s'est vue retirer une partie de ses
droits de députée à la suite de sa participation à la flottille...
Parti indépendant, le Balad entretient des relations avec les
différents partis palestiniens, même si c'est de plus en plus
difficile avec le Mur et les restrictions de circulation. Il
soutient la résistance non armée comme à Bil'In, était dans la rue
contre l'agression israélienne à Gaza (100.000 manifestants) et se
mobilise fortement contre le blocus.
Les droits individuels et collectifs des Palestiniens d'Israël, qui
demandent l'égalité et leur reconnaissance en tant que minorité,
sont plus que jamais partie intégrante de toute solution au conflit
israélo-palestinien.
L'intervention de Jamal ZAHALKA était précédée d'une séquence
d'extraits de films et courts métrages montée et commentée avec
talent par
Ariel CYPEL, directeur artistique de Confluences.
Nous ont été donné à voir les discriminations et la situation
d'Apartheid dont sont victimes les Palestiniens en Israël au
quotidien dans plusieurs situations: le bus à Jérusalem, le travail
de l'autre coté du Mur, le mépris face à l'arrivée de nouveaux
arrivants palestiniens dans un "lotissement".... Tous ces films sont
connus en Israël,dans les circuits artistiques et intellectuels,sont
diffusés mais n'ont pas d'impact sur la population
israélienne,victime de l'autocensure.
La situation des travailleurs palestiniens en Israël
Nous avions également invité
Arafat AMRO, Palestinien,
représentant pour le Nord de la Cisjordanie de Kad LaOved. Cette ONG
israélienne milite pour l'égalité des droits de tous les
travailleurs discriminés en Israël et dans les colonies israéliennes
des Territoires occupés.
Arafat a témoigné de la situation complètement discriminatoire des
Palestiniens : 20.000 travaillent avec un permis en Israël, dans la
construction et l'agriculture, 25.000 travaillent avec un permis
dans les colonies de Cisjordanie et plus de 10.000 sans permis,
principalement dans les colonies agricoles de la Vallée du Jourdain.
Les salaires dans l'agriculture sont le tiers du salaire minimum
obligatoire, dans l'industrie les 2/3. Il y a souvent "séparation"
(WC distincts, pas de cantine pour les Palestiniens...).
Le travail est dangereux et sans protections (pesticides, produits
chimiques...).
Les accidents du travail ne sont pas reconnus et les Palestiniens
blessés se débrouillent alors pour franchir les barrages et
rejoindre l'hôpital palestinien le plus proche...
Kad LaOved travaille (souvent avec les syndicats palestiniens) pour
faire prendre conscience aux salariés de leur situation et les
soutient lors d'actions en justice qu'ils engagent pour faire
reconnaître leurs droits.
Un débat sur la situation et la stratégie du peuple palestinien
Le débat final, avec Bernard Ravenel, historien et président de la
Plateforme des ONG pour la Palestine, Jamal Zahalka, Yaël Lerer,
Arafat Amro, et Safwat Ibraghit, conseiller auprès de l'ambassadeur
de la Palestine en France, avait pour thème: "Quelles perspectives
aujourd'hui pour les peuples palestinien et israélien ? Quelles
actions ici pour le respect du Droit ?"
Nous avons principalement traité des obstacles à la paix, de la
stratégie du peuple palestinien, des attentes vis-à-vis du mouvement
de solidarité.
Pour Bernard Ravenel, un des principaux obstacles à la paix est le
déséquilibre des forces, avec la puissance militaire considérable de
l'Etat d'Israël, et les coups très durs pris par la résistance
palestinienne depuis le début des années 2000. Jamal Zahalka estime
que l'Etat d'Israël n'est aujourd'hui pas mûr pour la paix, le
pouvoir continue à se "droitiser" et à mettre tous les obstacles
possibles à la paix, et les réactions de solidarité des citoyens
juifs d'Israël sont très faibles.
Le débat s'est alors engagé alors sur la stratégie pour le peuple
palestinien aujourd'hui. Safwat Ibraghit a assuré que les
négociations en cours n'impliquaient aucun renoncement aux droits du
peuple palestinien, Jamal Zahalka estimant, lui, que ces
négociations affaiblissent la position du peuple palestinien. Pour
lui, la solution à deux Etats est morte, celle à un seul Etat
n'existe pas encore de manière crédible, en attendant il faut se
battre pour l'égalité des droits.
Arafat Amro a donné sur ce point sa position personnelle, de citoyen
palestinien engagé, vivant sous occupation et ayant comme beaucoup
d'autres passé plusieurs années en prison: il croit encore à la
solution à deux Etats, si elle est soutenue par un mouvement
populaire palestinien, par des positions fermes des pays arabes et
de la communauté internationale. Il a rappelé l'importance de
l'unité du peuple palestinien, et indiqué que, si tout le monde est
d'accord sur le mot "résistance", les avis divergent sur les
modalités de cette résistance. Tout en rappelant que c'est l'affaire
du peuple palestinien, Bernard Ravenel a donné, pour sa part,
quelques points de repère essentiels:
- s'appuyer sur la légalité internationale, principale force des
Palestiniens;
- les négociations doivent partir des résolutions de l'ONU qui
constituent le Droit, elles ne doivent pas avoir pour objet de
discuter ce Droit ;
- il n'y a pas de négociation sans résistance, pas de résistance
sans négociation ; aujourd'hui, la négociation a échoué, mais la
résistance armée aussi ; la résistance non armée est la seule
capable de réaliser l'unité des Palestiniens,
- toute stratégie doit être soutenue par l'opinion publique mondiale
et rechercher le soutien des Etats dans le monde.
La solidarité du mouvement citoyen plus que jamais nécessaire
Yaël Lerer, en tant que militante juive israélienne du parti Balad,
et en tant que militante de la Coalition des Femmes pour la Paix, a
rappelé d'abord que la solidarité internationale doit s'appuyer sur
une vision claire du côté palestinien : on cherche la manière de
vivre ensemble. Elle a rappelé la responsabilité politique du
mouvement de solidarité en France, qui est de s'opposer à la
politique du Président de la République qui soutient
inconditionnellement l'Etat d'Israël. Elle a rappelé toute
l'importance dans ce contexte de la campagne BDS, soutenue aussi en
Israël par la Coalition des Femmes pour la Paix qui animent le site
internet "Who Profits ?"
Plus que jamais, la mobilisation citoyenne, dont les Six Heures pour
la Palestine sont une expression forte, doit jouer un rôle essentiel
pour une paix réelle fondée sur le respect du Droit.